Bonjour et merci d’être fidèle au rendez-vous !
Ce n’est un secret pour personne, le confinement que nous venons de vivre a eu pour conséquence une explosion du télétravail, ce qui paraît a priori réjouissant pour la planète.
C’est ainsi que fin mars, 1 salarié sur 4 était en télétravail (enquête Dares) et que, pour le moment, les entreprises sont invitées poursuivre ce mode de travail chaque fois que possible. De son côté, le ministère du travail estime à 30 % (9 millions de personnes) la part de la population active susceptible de travailler à distance.
Etant donné que le secteur des transports est le plus gros émetteur de gaz à effet de serre en France et que 7 Français sur 10 utilisent leur voiture personnelle pour se rendre sur leur lieu de travail, on pourrait penser intuitivement que le télétravail pourrait être une solution pour réduire nos émissions de GES.
J’ai lu tant de données contradictoires à ce propos que j’ai voulu en avoir le cœur net et vous livre mes petits calculs perso. (J’en donne les détails, mais vous avez le droit d’être assommé et de passer directement aux conclusions !)
Les Français qui utilisent leur voiture personnelle pour aller travailler habitent en moyenne à 15 km de leur lieu de travail. Prenons donc l’exemple d’une personne qui effectue 5 fois par semaine 30 km/jour pour aller au travail et en revenir. Ses trajets lui font faire environ 6 800 km/an, ce qui représente 1,8 tonne CO2 (en tablant sur une consommation moyenne de 7,2 l aux 100 km et en utilisant l’outil Micmac pour convertir en équivalent carbone).
- Avec 2 jours par semaine en télétravail, la réduction correspondante des émissions de CO2 serait de – 720 kg CO2/an.
- Dans une hypothèse très haute, avec 1 seul jour de travail au bureau et 4 jours de télétravail, la réduction serait de – 1,4 tonne de CO2/an, soit environ 14% de l’empreinte carbone moyenne d’un Français !
Enoncé comme ça, le chiffre de – 1,4 tonne est séduisant !
Pour le transposer à l’échelon de la nation :
- Tablons sur 6,3 millions de télétravailleurs ne se déplaçant plus en voiture qu’une fois/semaine (9 millions d’actifs pouvant potentiellement télétravailler, dont 70% se déplaçant actuellement en véhicule individuel).
- Soit une baisse finale des émissions de CO2 de 8,8 millions de tonnes/an (1,4 tonne x 6,3 millions de télétravailleurs).
- Ce qui représenterait 2% l’empreinte carbone totale du pays (450 millions de tonnes CO2), et ceci dans l’hypothèse la plus haute (30% des actifs travaillant 4 jours/semaine en télétravail).
Deux pour cent, cela peut paraître peu ou beaucoup, selon votre façon de voir le verre, à moitié plein ou à moitié vide. Mais pour être complet, il faut ajouter au moins trois autres effets du télétravail bénéfiques par rapport aux émissions de GES :
- Réduction des autres déplacements professionnels en voiture/train/avion (par exemple pour assister à une réunion dans une autre ville ou à l’étranger…).
- Moindre besoin de bureaux et baisse de la construction de locaux professionnels, or chaque mètre carré de bureau construit représente 1 tonne de CO2 émis sur l’ensemble de son cycle de vie.
- Et surtout moindre besoin de chauffage/climatisation/éclairage (puisque moins de bureaux), ce qui correspondrait à une baisse potentielle importante des émissions de CO2 (une étude Smart de 2008 chiffrait ce potentiel à 11,7 millions de tonnes pour la France, dans une hypothèse de télétravail certainement moins haute que la mienne).
Difficile de chiffrer tout cela, mais il me semble qu’on pourrait grossièrement, et au minimum, multiplier par 2,5 la baisse de 2% calculée plus haut. Ce qui nous amènerait au final à abaisser de 5% l’empreinte carbone totale du pays, toujours dans une hypothèse de 30% des actifs travaillant 4 jours/semaine en télétravail.
Tous comptes faits, le télétravail est-il une piste sérieuse pour la réduction de nos émissions de gaz à effet de serre ou non ? Je vous laisse juge…
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Sources
- LBMG – Le télétravail pour réduire les émissions de CO2
- Le Génie des lieux – À domicile ou en tiers-lieux, démocratisons le télétravail au bénéfice du climat, des salariés et des entreprises
- Organyze – 2 jours de télétravail par semaine permettraient d’économiser 3 millions de tonnes de CO2
- Jean-Marc Jancovici – Bénéfices environnementaux envisageables liés à l’introduction du télétravail
Un article très intéressant. 5% d’émissions de gaz à effet de serre en moins, ce n’est pas rien, je choisis pour ma part de voir le verre à moitié plein. Par contre l’hypothèse 30% des actifs travaillant 4 jours/semaine en télétravail me paraît assez irréaliste. Mais ça peut représenter un horizon vers lequel tendre.
Bravo pour votre blog !
Bonjour et merci Hugo ! Oui, certes, l’hypothèse que j’ai prise est une hypothèse maximum, mais ça permet de voir ce qu’on peut espérer au mieux. Je suis d’accord avec vous 5%, même si c’est le maximum, c’est très bon à prendre ! Alors vive le télétravail !
Bonjour, très intéressant en effet. Mais je ne comprends pas pourquoi, après avoir explicité tous vos calculs (pfiou… quel boulot !), à la fin vous multipliez simplement le chiffre obtenu par 2,5 sans explication. Quelles sont vos hypothèses ?
Bonjour Céline,
Pour multiplier par 2,5, j’ai pris en compte le chiffre de l’étude Smart, soit 11,7 millions de tonnes CO2 d’économies de chauffage/climatisation/éclairage liées à la diminution des surfaces de bureaux.
11,7 millions de tonnes + 8,8 millions de tonnes/an d’économies liées à la réduction des transports domicile-bureau = 20,5 millions de tonnes.
20,5/8,8 = 2,3
J’ai pris un coefficient multiplicateur de 2.5, juste un peu plus élevé, pour y intégrer au moins en partie la réduction des autres déplacements professionnels en voiture/train/avion et la baisse de la construction de locaux professionnels.
C’est très grossier, je vous l’accorde !